Les Trois Villes
Les Trois Villes est
un cycle romanesque écrit par Émile Zola entre 1893
et 1898. Il suit directement le cycle précédent du romancier
: Les Rougon-Macquart. Son héros, l'abbé Pierre Froment,
sert de fil rouge aux trois romans, Lourdes, Rome et Paris, dans lesquels
Zola s'interroge sur la place de la religion dans la société
moderne, mais aussi sur la confrontation entre une bourgeoisie rayonnante
face à un monde ouvrier misérable.
Lourdes
Un voyage dans les Pyrénées conduit Zola à Lourdes
en 1891, où il observe effaré « un monde de croyants
hallucinés ». Il annonce son projet sur la ville miraculeuse
en juillet 1892, dans le périodique Gil Blas, « sans
intention malveillante ». Puis repart pour le centre de pélerinage,
voyage à l'issue duquel il décide de scinder l'uvre
à venir en deux romans, avec Rome. À l'automne, il rajoute
Paris, « la part du socialisme qui ouvre vers le XXe siècle
» au deux premiers, concevant finalement un nouveau cycle portant
sur la place du religieux dans la société française
de la fin du XIXe siècle. Il écrit : « Ma trilogie,
qui contiendra le bilan religieux, philosophique et social du siècle,
sera moins pessimiste que le reste de mon uvre, et animée
d'un souffle d'idéal et d'espoir[1] ».
Lourdes paraît
le 25 juillet 1894, après avoir été publié
en feuilleton dans Gil Blas. L'intrigue expose cinq journées
d'un pèlerinage mettant en scène l'abbé Pierre
Froment, personnage fil rouge du cycle. Le roman peint tout à
la fois la souffrance des pèlerins dans leur foi et «
le besoin de surnaturel persistant chez l'homme malgré les
conquêtes de la science ». Il dénonce aussi les
escroqueries à la guérison, les rivalités entre
les différents courants du clergé, les Pères
de la grotte assimilés à de nouveaux marchands du temple.
Les réactions à la publication de Lourdes sont immédiates,
la polémique lancée par Mgr Ricard[2] est reprise et
alimentée par la droite catholique. Elle aboutit à la
mise à l'Index du roman et de toute l'uvre d'Émile
Zola. Cependant, le livre remporte un succès énorme,
vendu à cent-vingt mille exemplaires en un mois[3], troisième
roman de Zola le plus vendu au 1er mars 1898[4].
Rome
Le second volume des Trois Villes, Rome, place l'action dans la ville
sainte, où Pierre Froment est venu défendre son livre,
La Rome nouvelle contre une éventuelle mise à l'Index.
Il s'y mêle une histoire d'amour sous une forme mélodramatique,
puisque les deux amants Dario et Benedetta meurent victimes du poison
des Borgias, des tableaux sans concessions du Pape et de son clergé,
mais aussi de belles descriptions d'une Rome tridimensionnelle (antique,
religieuse et moderne en pleine construction). C'est l'occasion pour
Zola de dresser le bilan d'un « néochristianisme »
qui tente d'assimiler la modernité d'une conscience universelle
en évolution, au carrefour des XIXe et XXe siècles.
Comme toujours, le romancier s'est très sérieusement
documenté, voyageant pendant six semaines à Rome et
en Italie fin 1894[5]. Mais malgré sa demande, il ne fut pas
reçu par le Pape Léon XIII.
« Enfin ! M. Zola arrive au bout de son rouleau en mettant au
monde Paris. Le père et l'enfant se portent bien tout de même
». Caricature de C. Léandre vers 1898Rome est publié
simultanément en feuilleton dans Le Journal à Paris
et dans La Tribuna à Rome à partir de décembre
1895 jusqu'à mai 1896. Le volume est en librairie le 8 mai
1896. Les réactions sont partagées, avec une nouvelle
polémique logiquement issue des milieux de la droite cléricale
et conservatrice. Sa presse ne trouve aucun intérêt dans
le roman, et dresse la liste des invraisemblances qui gâteraient
l'ouvrage. Zola est même accusé de plagiat[6] à
l'occasion d'une campagne visant à lui barrer une fois de plus
l'entrée de l'Académie française, et il se doit
de répondre par un article très documenté en
exposant toutes ses sources[7]. Mais déjà, le romancier
pense à clore sa trilogie.
Paris
L'idée de Paris est venue à Zola en septembre 1892.
Le contexte anarchiste des années 1892-1894 avec leurs attentats[8],
mais aussi la révélation du Scandale de Panamá,
qui met en cause une part du monde politique républicain et
la sphère financière, inspirent l'écrivain. Pierre
Froment est donc toujours le personnage principal. Ayant perdu toute
foi, il décide de se consacrer à la charité envers
les plus pauvres, sans succès. Il s'oppose à son frère
chimiste et anarchiste, concepteur d'un nouvel explosif surpuissant,
qui veut changer le monde par l'usage de la terreur et de la violence.
Le héros comprend alors la nécessité d'un renouvellement
organisationnel de la société pour combattre la misère.
Zola brosse aussi le tableau du Paris de l'argent, de la politique
et du plaisir, en opposition à l'extrême pauvreté
qui pousse à l'anarchie[9].
Rédigé
de janvier à août 1897, le roman est d'abord publié
dans Le Journal d'octobre 1897 au 9 février 1898[10]. La parution
de l'ouvrage tombe en pleine affaire Dreyfus, au moment où
Zola publie J'Accuse...!. Le romancier décide de décaler
la parution de Paris au 1er mars 1898, à la demande de son
éditeur, Charpentier. Comme il était possible de s'y
attendre, la réaction de la presse de droite conservatrice
est d'autant plus hostile que des personnalités d'extrême
droite, comme Édouard Drumont[11] se sont reconnus au fil des
chapitres. La critique véhémente du livre se conjugue
au lynchage médiatique consécutif à la condamnation
de Zola. A gauche, Jaurès affirme que « Paris est une
protestation hardie contre toutes les puissances de mensonge et de
servitude[12] ». Léon Blum quant à lui, écrit
: « Jamais M. Zola n'a développé avec plus de
lucidité et de force sa vision optimiste de l'humanité
en marche »
1. Lourdes.en
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Rome en PDF
3. Paris.
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