Poésies nouvelles
et inédites
À la princesse
Bathilde 1845
La cloche matinale enfin a sonné lheure
Où les pâles Willis, quun jour trop vif effleure,
Près du sylphe qui dort vont se glisser sans bruit
Au cur des nénufars et des belles-de-nuit ;
Giselle défaillante avec de molles poses
Lentement disparaît sous son linceul de roses,
Et lon naperçoit plus du fantôme charmant
Quune petite main tendue à son amant.
Alors vous paraissez, chasseresse superbe,
Traînant votre velours sur le velours de lherbe,
Un sourire à la bouche, un rayon dans les yeux,
Plus fraîche que laurore éclose au bord des cieux
;
Belle au regard dazur, à la tresse dorée,
Que sur ses blancs autels la Grèce eût adorée ;
Pur marbre de Paros, que les Grâces, en chur,
Dans leur groupe admettraient pour quatrième sur.
De la forêt magique illuminant la voûte,
Une vive clarté se répand, et lon doute
Si le jour, qui renaît dans son éclat vermeil,
Vient de votre présence ou sil vient du soleil !
Giselle meurt ; Albert éperdu se relève,
Et la réalité fait envoler le rêve ;
Mais en attraits divins, en chaste volupté,
Quel rêve peut valoir votre réalité ?
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