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Un esprit qui
marche de lueur en lueur
et qui s'arrête éperdu - au bord de l'infini
Victor Hugo
1802 - 1885
Biographie
Son
oeuvre :
Poésie lyrique : Odes et ballades
(1826) Poésie satirique : Les châtiments (1853) Poésie épique : La légende des siècles (1859,1876,1883) Théâtre : Cromwell (1827) Romans : Notre-Dame de Paris
(1831) |
Victor Hugo (1802-1885) Poète, romancier, dramaturge, critique, Victor Hugo est, certes, un auteur dune stature incomparable et inégalée. Sa devise «!Ego Hugo!», qui traduit son orgueil légendaire (sa mégalomanie, selon ses détracteurs), a poussé Jean Cocteau à écrire que «!Victor Hugo était un fou qui se croyait Victor Hugo.!». Il nen reste pas moins quà lâge de trente ans, Victor Hugo, à la tête du mouvement romantique, avait révolutionné le théâtre et inventé une nouvelle langue poétique, et quà cinquante ans il eut le courage dabandonner sans hésiter une existence confortable et une situation acquise pour lexil, au nom de la résistance à la dictature de Napoléon III. Enfance Victor Marie Hugo fut, historiquement, un enfant de la Révolution. Ses parents firent connaissance en 1796 et se marièrent lannée suivante. Son père, Léopold Hugo, appartenait à une famille dartisans de Nancy, tandis que sa mère, Sophie Trébuchet, était née dans la bonne bourgeoisie nantaise : Hugo était donc issu de deux milieux très différents. De lunion assez malheureuse de Léopold et Sophie naquirent trois enfants : Abel (1798), Eugène (1800) et Victor (1802). Victor Hugo vit le jour le 26 février 1802 à Besançon où son père, qui sétait enrôlé très jeune, était en garnison. Léopold Hugo suivit les drapeaux vainqueurs de Bonaparte!; il connut une ascension rapide dans la hiérarchie militaire, ce qui lui permit daccéder au poste de gouverneur dAvellino en Italie, puis dêtre nommé gouverneur de trois provinces et comte de Siguenza en Espagne. Lenfance de Victor fut quelque peu mouvementée, partagée entre Paris et les lieux de mutation de son père, entre lamant de sa mère (le général Victor Lahorie) et les maîtresses de son père. À quatorze ans, le futur poète écrivit sur un cahier décolier : «!Je veux être Chateaubriand ou rien.!» À dix-sept ans, il fonda avec son frère Abel une revue, le Conservateur littéraire, rédigée presque intégralement par lui. À vingt ans, le jeune poète publia ses Odes (1822), recueil encore classique par sa forme mais plein daudace, qui lui valut une pension royale. Il devait le remanier quelques années plus tard, sous le titre Odes et Ballades (1828). La disparition de sa mère en 1821 permit à Victor dépouser lannée suivante Adèle Foucher, son amie denfance. De ce mariage, il eut quatre enfants : Léopoldine (1824), Charles (1826), François-Victor (1828) et Adèle (1830). Chef de file du romantisme Le créateur du drame romantique En 1827, la préface que Victor Hugo rédigea à sa tragédie, Cromwell - sa première uvre dramatique -, devint immédiatement le manifeste du théâtre romantique (voir Drame et art dramatique). Ce traité se divisait en trois parties : la première, à finalité destructrice, condamnait les règles aristotéliciennes de lunité de lieu et de temps (deux des règles appliquées dans le théâtre classique), la deuxième partie recommandait en revanche de conserver la seule règle aristotélicienne acceptable, celle qui concernait lunité daction, tandis que la troisième partie affirmait le droit et le devoir, pour lart, de représenter la réalité sous tous ses aspects. Hugo définissait ainsi, contre lesthétique du théâtre classique, les règles dun nouveau genre théâtral, le drame romantique. Le drame romantique né des théories de Hugo se caractérise par lintroduction du laid et du grotesque sur la scène théâtrale, par un plus grand souci de la couleur locale et surtout par le mélange des genres - puisquau sein dun même drame figurent des éléments tragiques et comiques. Le 25 février 1830, la représentation de la pièce Hernani, qui donne à Hugo loccasion de mettre lui-même en pratique ses principes, se déroula dans une atmosphère surchauffée par les polémiques entre défenseurs de la tradition et tenants des nouvelles doctrines. Cest cette soirée mouvementée, restée dans lhistoire littéraire sous le nom de «!bataille dHernani!», qui fit officiellement de Hugo le chef de file du romantisme français. Hugo illustra encore ses théories au théâtre, notamment avec des drames passionnés comme Le roi samuse (1832), interdit par la censure, Lucrèce Borgia (1833) ou Ruy Blas (1838), un de ses drames les plus connus. Le poète lyrique Sa renommée de poète lyrique était confirmée par la publication de divers recueils de vers. Léclatante révélation de Hugo comme poète romantique date en effet de 1829 avec le recueil des Orientales, nourri dimages de la Grèce en flammes et de visions de villes espagnoles. Des Feuilles dautomne (1831) au recueil les Rayons et les Ombres (1840), saffirment les thèmes majeurs de la poésie hugolienne : la nature, lamour, le droit du rêve. Dans les Voix intérieures (1837) apparaît le personnage dOlympio, double et interlocuteur du poète, qui fut immortalisé peu après par le célèbre poème «!Tristesse dOlympio!» dans les Rayons et les Ombres. Romancier du petit peuple Lévolution de Hugo du catholicisme et du monarchisme vers une pensée libérale et sociale, vers la compassion pour le petit peuple, est perceptible dans toute son uvre, mais cest dans ses romans quelle apparaît de la façon la plus flagrante. Cest en 1831 que vit le jour le premier des grands romans historiques de Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, qui met en scène un couple devenu mythique, Quasimodo et Esmeralda. Hugo avait débuté auparavant dans la prose avec Han dIslande (1823) et Bug-Jargal (1826) et, en 1829, il avait publié un court texte contre la peine de mort : le Dernier Jour dun condamné. Demblée, le récit hugolien, quoique pittoresque et romanesque, prit une orientation très critique : raillant les genres en vogue, il posait en outre, sur le mode ironique le plus souvent, les problèmes de lactualité politique et sociale ou de la misère ouvrière (Han dIslande), tout en sinterrogeant sur les moyens par lesquels le peuple pourrait conquérir le droit à la parole (Notre-Dame de Paris). Écrivain consacré Au fil du temps,
le succès public ne se démentit pas, malgré quelques
démêlés avec la censure (linterdiction de
Marion Delorme par exemple, en 1829). En 1833, Hugo rencontra Juliette
Drouet, qui devait le suivre en exil et rester sa maîtresse
dévouée pendant cinquante ans. Poète consacré,
officialisé par son élection à lAcadémie
française en 1841 (voir Institut de France), Victor Hugo fut
doublement affecté, au cours de lannée 1843, par
léchec de son drame les Burgraves, qui marquait le premier
signe de la décadence du théâtre romantique, et
surtout par la mort tragique de sa fille Léopoldine, noyée
dans la Seine avec son mari. |
Le poète composa en souvenir de son enfant les poèmes qui prirent place dans le quatrième livre des Contemplations (1856), «!Pauca Meae!». Mais les événements politiques lui réservaient dautres tourments encore : au moment de la révolution de 1848, Victor Hugo était républicain, libéral et progressiste, et le journal quil avait fondé à cette époque, lÉvénement, salua dabord avec enthousiasme lavènement de Louis-Napoléon Bonaparte. Mais le coup dÉtat du 2 décembre 1851 fit brusquement prendre conscience à Hugo des ambitions de Bonaparte, et le précipita bientôt sur la route de lexil : «!Je resterai proscrit, voulant rester debout!». Dabord à Jersey, puis à Guernesey, dans sa maison de Hauteville House, il continua, pendant ses dix-neuf ans dexil, de vilipender Napoléon III tout en se consacrant à la littérature. Hugo, lopposant Poèmes de lexil Dans les Châtiments (1853), fruit du premier hiver dexil, Hugo consacra à «!Napoléon le Petit!», comme il lappelait, toute une série de vers aussi indignés que véhéments. Louvrage circula aussitôt en contrebande en France. Le recueil des Châtiments se compose de 6 200 vers, organisés en sept parties. Chacune de ces parties a pour titre une des formules quavait utilisées Napoléon III pour justifier son coup dÉtat. Le recueil souvre sur un poème Nox («!nuit!») auquel répond un autre poème, Lux («!lumière, jour!») : le premier fait allusion aux ténèbres qui enveloppent le temps présent (le règne de Napoléon III), le second confirme lespérance dun avenir meilleur. Une fois les Châtiments écrits et publiés, Victor Hugo se lança, avec sa poésie, à lassaut de tous les domaines de la connaissance : connaissance de la nature, du moi et de lunivers dans les Contemplations (1856), exploration et synthèse de lhistoire dans la Légende des siècles (1859-1883), connaissance du divin dans Dieu (écrit en 1855, posthume, 1891) et dans la Fin de Satan (posthume, 1886). Si les Contemplations sarticulent encore autour de la terrible épreuve que fut pour le poète la mort de sa fille (les poèmes «!Autrefois!» et «!Aujourdhui!» y évoquent Léopoldine), la Légende des siècles est le projet dune épopée qui embrasse la totalité de lhistoire et dont les poèmes illustrent la suite des âges. Romans de lexil Dans la solitude de lexil naquirent également les plus grands romans de Victor Hugo. Imaginé et travaillé dès 1840, à limage des grands romans sociaux de Balzac ou de Sue, les Misérables fut publié en 1862 et accueilli avec réserve par la critique mais avec un enthousiasme délirant par le public, tant en Europe quaux États-Unis. Hugo confiait dailleurs à son éditeur, avant même davoir achevé la relecture des Misérables : «!Ma conviction est que ce livre sera un des principaux sommets, sinon le principal, de mon uvre.!» Les Misérables met en scène lhistoire et le progrès du peuple en marche!; malgré cette dimension épique, les personnages principaux - leurs expériences, leur souffrance, etc. - sont nettement individualisés. Fantine, Jean Valjean, Cosette, Marius, Gavroche restent en effet dans leurs destins particuliers (quoique représentatifs de toute leur classe) les enjeux essentiels du récit. À la vision réaliste du monde que proposent les romans de Balzac ou de Flaubert, soppose lunivers fabuleux (bien quhistoriquement marqué) des Travailleurs de la mer (1866) ou de lHomme qui rit (1869). Les Travailleurs de la mer se présente comme le récit de la conquête de la nature par lHomme, puisque les deux personnages principaux, Lethierry et Gilliatt, mus par leur idéal, y affrontent héroïquement la violence des tempêtes et de la faune marine. Quant à lHomme qui rit, il conte les épreuves de Gwymplaine, fils dun noble proscrit à cause de ses opinions républicaines dans lAngleterre de la fin du XVe siècle. Les Travailleurs de la mer, lHomme qui rit et Quatre vingt-treize, roman sur la Révolution écrit en 1872 lors dun retour volontaire à lexil, montrent avant tout léchec de lhomme à réformer une société injuste et inégalitaire. Un patriarche des lettres Lécroulement de lEmpire lors de la guerre contre la Prusse en 1870 permit à Victor Hugo de revenir en France. Son retour fut triomphal et, en février, il fut élu député à la Constituante avec 214 169 voix. Il avait de vastes projets politiques : abolition de la peine de mort, réforme de la magistrature, défense des droits de la femme, instruction obligatoire et gratuite, création des États-Unis dEurope. Mais, au bout dun mois, désillusionné, il démissionna. Avec lAnnée terrible (1872), sa poésie retrouva le ton des Châtiments pour témoigner des événements de la Commune. Hugo était alors devenu pour les Français une sorte de patriarche national des lettres. Lorsquil séteignit, le 22 mai 1885, un cortège de plusieurs centaines de milliers de personnes suivit, depuis lÉtoile jusquau Panthéon, le «!corbillard des pauvres!» quil avait réclamé. «!Je donne cinquante mille francs aux pauvres. Je désire être porté au cimetière dans leur corbillard. Je refuse loraison de toutes les Églises. Je demande une prière à toutes les âmes. Je crois en Dieu.!» : ce furent là ses dernières volontés. Victor Hugo fut peut-être, de tous les écrivains français, le plus remarquable par la longévité de son inspiration et par sa parfaite maîtrise technique. Aussi aborda-t-il tous les thèmes, utilisa-t-il tous les registres et tous les genres, allant de la fresque épique au poème intimiste. Son influence est encore aujourdhui incommensurable. Certains de ses textes dobservation comme Choses vues ou de ses textes critiques comme Littérature et philosophie mêlées (1834) ou William Shakespeare (1864) témoignent, sil était besoin, de la cohérence esthétique et de la plénitude de luvre hugolienne. Encyclopédie
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