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Théophile Gautier 1811 - 1872
Les Jeunes-France
Romans guoguenards
1833



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Onuphrius
ou les vexations fantastiques d'un admirateur d'Hoffmann


Harassé de fatigue, il se jeta sur un divan et ne tarda pas à s'endormir : son sommeil était agité; le cauchemar lui avait mis le genou sur l'estomac. Il fit une multitude de rêves incohérents, monstrueux, qui ne contribuèrent pas peu à déranger sa raison déjà ébranlée. En voici un qui l'avait frappé, et qu'il m'a raconté plusieurs fois depuis.

« J'étais dans une chambre qui n'était pas la mienne ni celle d'aucun de mes amis, une chambre où je n'étais jamais venu, et que cependant je connaissais parfaitement bien : les jalousies étaient fermées, les rideaux tirés; sur la table de nuit une pâle veilleuse jetait sa lueur agonisante. On ne marchait que sur la pointe du pied, le doigt sur la bouche; des fioles, des tasses encombraient la cheminée. Moi, j'étais au lit comme si j'eusse été malade, et pourtant je ne m'étais jamais mieux porté. Les personnes qui traversaient l'appartement avaient un air triste et affairé qui semblait extraordinaire.

« Jacintha était à la tête de mon lit, qui tenait sa petite main sur mon front, et se penchait vers moi pour écouter si je respirais bien. De temps en temps une larme tombait de ses cils sur mes joues, et elle l'essuyait légèrement avec un baiser.

« Ses larmes me fendaient le cœur, et j'aurais bien voulu la consoler; mais il m'était impossible de faire le plus petit mouvement, ou d'articuler une seule syllabe : ma langue était clouée à mon palais, mon corps était comme pétrifié.

« Un monsieur vêtu de noir entra, me tâta le pouls, hocha la tête d'un air découragé, et dit tout haut : « C'est fini » ! Alors Jacintha se prit à sangloter, à se tordre les mains, et à donner toutes les démonstrations de la plus violente douleur : tous ceux qui étaient dans la chambre en firent autant. Ce fut un concert de pleurs et de soupirs à apitoyer un roc. « J'éprouvais un secret plaisir d'être regretté ainsi. On me présenta une glace devant la bouche; je fis des efforts prodigieux pour la ternir de mon souffle, afin de montrer que je n'étais pas mort : je ne pus en venir à bout. Après cette épreuve on me jeta le drap par- dessus la tête; j'étais au désespoir, je voyais bien qu'on me croyait trépassé et que l'on allait m'enterrer tout vivant. Tout le monde sortit : il ne resta qu'un prêtre qui marmotta des prières et qui finit par s'endormir.

« Le croque-mort vint qui me prit mesure d'une bière et d'un linceul; j'essayai encore de me remuer et de parler, ce fut inutile, un pouvoir invincible m'enchaînait : force me fut de me résigner. Je restai ainsi beaucoup de temps en proie aux plus douloureuses réflexions. Le croque-mort revint avec mes derniers vêtements, les derniers de tout homme, la bière et le linceul : il n'y avait plus qu'à m'en accoutrer.

« Il m'entortilla dans le drap, et se mit à me coudre sans précaution comme quelqu'un qui a hâte d'en finir : la pointe de son aiguille m'entrait dans la peau, et me faisait des milliers de piqûres; ma situation était insupportable. Quand ce fut fait, un de ses camarades me prit par les pieds, lui par la tête, ils me déposèrent dans la boîte; elle était un peu juste pour moi, de sorte qu'ils furent obligés de me donner de grands coups sur les genoux pour pouvoir enfoncer le couvercle.

« Ils en vinrent à bout à la fin, et l'on planta le premier clou. Cela faisait un bruit horrible. Le marteau rebondissait sur les planches, et j'en sentais le contre coup. Tant que l'opération dura, je ne perdis pas tout à fait l'espérance; mais au dernier clou je me sentis défaillir, mon cœur se serra, car je compris qu'il n'y avait plus rien de commun entre le monde et moi : ce dernier clou me rivait au néant pour toujours. Alors seulement je compris toute l'horreur de ma position.

« On m'emporta; le roulement sourd des roues m'apprit que j'étais dans le corbillard; car bien que je ne pusse manifester mon existence d'aucune manière, je n'étais privé d'aucun de mes sens. La voiture s'arrêta, on retira le cercueil. J'étais à l'église, j'entendais parfaitement le chant nasillard des prêtres, et je voyais briller à travers les fentes de la bière la lueur jaune des cierges. La messe finie, on partit pour le cimetière; quand on me descendit dans la fosse, je ramassai toutes mes forces, et je crois que je parvins à pousser un cri; mais le fracas de la terre qui roulait sur le cercueil le couvrit entièrement : je me trouvais dans une obscurité palpable et compacte, plus noire que celle de la nuit. Du reste, je ne souffrais pas, corporellement du moins; quant à mes souffrances morales, il faudrait un volume pour les analyser. L'idée que j'allais mourir de faim ou être mangé aux vers sans pouvoir l'empêcher, se présenta la première; ensuite je pensai aux événements de la veille, à Jacintha, à mon tableau qui aurait eu tant de succès au Salon, à mon drame qui allait être joué, à une partie que j'avais projetée avec mes camarades, à un habit que mon tailleur devait me rapporter ce jour-là; que sais-je, moi ? à mille choses dont je n'aurais guère dû m'inquiéter; puis revenant à Jacintha, je réfléchis sur la manière dont elle s'était conduite. Je repassai chacun de ses gestes, chacune de ses paroles, dans ma mémoire; je crus me rappeler qu'il y avait quelque chose d'outré et d'affecté dans ses larmes, dont je n'aurais pas dû être la dupe : cela me fit ressouvenir de plusieurs choses que j'avais totalement oubliées; plusieurs détails auxquels je n'avais pas pris garde, considérés sous un nouveau jour, me parurent d'une haute importance. Des démonstrations que j'aurais juré sincères me semblèrent louches ; il me revint dans l'esprit qu'un jeune homme, une espèce de fat moitié cravate, moitié éperons, lui avait autrefois fait la cour. Un soir, nous jouions ensemble, Jacintha m'avait appelé du nom de ce jeune homme au lieu du mien, signe certain de préoccupation; d'ailleurs je savais qu'elle en avait parlé favorablement dans le monde à plusieurs reprises, et comme de quelqu'un qui ne lui déplairait pas.

« Cette idée s'empara de moi, ma tête commença à fermenter; je fis des rapprochements, des suppositions, des interprétations : comme on doit bien le penser, elles ne furent pas favorables à Jacintha. Un sentiment inconnu se glissa dans mon cœur, et m'apprit ce que c'était que souffrir; je devins horriblement jaloux, et je ne doutai pas que ce ne fût Jacintha qui, de concert avec son amant, ne m'eût fait enterrer tout vif pour se débarrasser de moi. Je pensai que peut-être en ce moment même ils riaient à gorge déployée du succès de leur stratagème, et que Jacintha livrait aux baisers de l'autre cette bouche qui m'avait juré tant de fois n'avoir jamais été touchée par d'autres lèvres que les miennes.

« ä cette idée, j'entrai dans une fureur telle que je repris la faculté de me mouvoir; je fis un soubresaut si violent, que je rompis d'un seul coup les coutures de mon linceul. Quand j'eus les jambes et les bras libres, je donnai de grands coups de coudes et de genoux au couvercle de la bière pour le faire sauter et aller tuer mon infidèle aux bras de son lâche et misérable galant. Sanglante dérision, moi, enterré, je voulais donner la mort ! Le poids énorme de la terre qui pesait sur les planches rendit mes efforts inutiles. Épuisé de fatigue, je retombai dans ma première torpeur, mes articulations s'ossifièrent : de nouveau je redevins cadavre. Mon agitation mentale se calma, je jugeai plus sainement les choses : les souvenirs de tout ce que la jeune femme avait fait pour moi, son dévouement, ses soins qui ne s'étaient jamais démentis, eurent bientôt fait évanouir ces ridicules soupçons.

« Ayant usé tous mes sujets de méditation, et ne sachant comment tuer le temps, je me mis à faire des vers; dans ma triste situation, ils ne pouvaient pas être fort gais : ceux du nocturne Young et du sépulcral Hervey ne sont que des bouffonneries, comparés à ceux-là. J'y dépeignais les sensations d'un homme conservant sous terre toutes les passions qu'il avait eues dessus, et j'intitulai cette rêverie cadavéreuse : la Vie dans la mort. Un beau titre, sur ma foi ! et ce qui me désespérait, c'était de ne pouvoir les réciter à personne.

« J'avais à peine terminé la dernière strophe, que j'entendis piocher avec ardeur au-dessus de ma tête. Un rayon d'espérance illumina ma nuit. Les coups de pioche se rapprochaient rapidement. La joie que je ressentis ne fut pas de longue durée : les coups de pioche cessèrent. Non, l'on ne peut rendre avec des mots humains l'angoisse abominable que j'éprouvai en ce moment; la mort réelle n'est rien en comparaison. Enfin j'entendis encore du bruit : les fossoyeurs, après s'être reposés, avaient repris leur besogne. J'étais au ciel; je sentis ma délivrance s'approcher. Le dessus du cercueil sauta. Je sentis l'air froid de la nuit. Cela me fit grand bien, car je commençais à étouffer. Cependant mon immobilité continuait; quoique vivant, j'avais toutes les apparences d'un mort. Deux hommes me saisirent : voyant les coutures du linceul rompues, ils échangèrent en ricanant quelques plaisanteries grossières, me chargèrent sur leurs épaules et m'emportèrent. Tout en marchant ils chantonnaient à demi-voix des couplets obscènes. Cela me fit penser à la scène des fossoyeurs, dans Hamlet, et je me dis en moi-même que Shakespeare était un bien grand homme.

« Après m'avoir fait passer par bien des ruelles détournées, ils entrèrent dans une maison que je reconnus pour être celle de mon médecin; c'était lui qui m'avait fait déterrer afin de savoir de quoi j'étais mort. On me déposa sur une table de marbre. Le docteur entra avec une trousse d'instruments; il les étala complaisamment sur une commode. ä la vue de ces scalpels, de ces bistouris, de ces lancettes, de ces scies d'acier luisantes et polies, j'éprouvai une frayeur horrible, car je compris qu'on allait me disséquer; mon âme, qui jusque-là n'avait pas abandonné mon corps, n'hésita plus à me quitter : au premier coup de scalpel elle était tout à fait dégagée de ses entraves. Elle aimait mieux subir tous les désagréments d'une intelligence dépossédée de ses moyens de manifestation physique, que de partager avec mon corps ces effroyables tortures. D'ailleurs, il n'y avait plus espérance de le conserver, il allait être mis en pièces, et n'aurait pu servir à grand-chose quand même ce déchiquètement ne l'eût pas tué tout de bon. Ne voulant pas assister au dépècement de sa chère enveloppe, mon âme se hâta de sortir.

« Elle traversa rapidement une enfilade de chambres, et se trouva sur l'escalier. Par habitude, je descendis les marches une à une; mais j'avais besoin de me retenir, car je me sentais une légèreté merveilleuse. J'avais beau me cramponner au sol, une force invincible m'attirait en haut; c'était comme si j'eusse été attaché à un ballon gonflé de gaz : la terre fuyait mes pieds, je n'y touchais que par l'extrémité des orteils; je dis des orteils, car bien que je ne fusse qu'un pur esprit, j'avais conservé le sentiment des membres que je n'avais plus, à peu près comme un amputé qui souffre de son bras ou de sa jambe absente. Lassé de ces efforts pour rester dans une attitude normale, et, du reste, ayant fait réflexion que mon âme immatérielle ne devait pas se voiturer d'un lieu à l'autre par les mêmes procédés que ma misérable guenille de corps, je me laissai faire à cet ascendant, et je commençai à quitter terre sans pourtant m'élever trop, et me maintenant dans la région moyenne. Bientôt je m'enhardis, et je volai tantôt haut, tantôt bas, comme si je n'eusse fait autre chose de ma vie. Il commençait à faire jour : je montai, je montai, regardant aux vitres des mansardes des grisettes qui se levaient et faisaient leur toilette, me servant des cheminées comme de tubes acoustiques pour entendre ce qu'on disait dans les appartements. Je dois dire que je ne vis rien de bien beau, et que je ne recueillis rien de piquant. M'accoutumant à ces façons d'aller, je planai sans crainte dans l'air libre, au-dessus du brouillard, et je considérai de haut cette immense étendue de toits qu'on prendrait pour une mer figée au moment d'une tempête, ce chaos hérissé de tuyaux, de flèches, de dômes, de pignons, baigné de brume et de fumée, si beau, si pittoresque, que je ne regrettai pas d'avoir perdu mon corps. Le Louvre m'apparut blanc et noir, son fleuve à ses pieds, ses jardins verts à l'autre bout. La foule s'y portait; il y avait exposition : j'entrai. Les murailles flamboyaient diaprées de peintures nouvelles, chamarrées de cadres d'or richement sculptés. Les bourgeois allaient, venaient, se coudoyaient, se marchaient sur les pieds, ouvraient des yeux hébétés, se consultaient les uns les autres comme des gens dont on n'a pas encore fait l'avis, et qui ne savent ce qu'ils doivent penser et dire. Dans la grand-salle, au milieu des tableaux de nos jeunes grands maîtres, Delacroix, Ingres, Decamps, j'aperçus mon tableau, à moi : la foule se serrait autour, c'était un rugissement d'admiration; ceux qui étaient derrière et ne voyaient rien criaient deux fois plus fort : Prodigieux ! prodigieux ! Mon tableau me sembla à moi- même beaucoup mieux qu'auparavant, et je me sentis saisi d'un profond respect pour ma propre personne. Cependant, à toutes ces formules admiratives se mêlait un nom qui n'était pas le mien; je vis qu'il y avait là-dessous quelque supercherie. J'examinai la toile avec attention : un nom en petits caractères rouges était écrit à l'un de ses coins. C'était celui d'un de mes amis qui, me voyant mort, ne s'était pas fait scrupule de s'approprier mon œuvre. Oh ! alors, que je regrettai mon pauvre corps ! Je ne pouvais ni parler, ni écrire; je n'avais aucun moyen de réclamer ma gloire et de démasquer l'infâme plagiaire. Le cœur navré, je me retirai tristement pour ne pas assister à ce triomphe qui m'était dû. Je voulus voir Jacintha. J'allai chez elle, je ne la trouvai pas; je la cherchai vainement dans plusieurs maisons où je pensais qu'elle pourrait être. Ennuyé d'être seul, quoiqu'il fût déjà tard, l'envie me prit d'aller au spectacle; j'entrai à la Porte-Saint-Martin, je fis réflexion que mon nouvel état avait cela d'agréable que je passais partout sans payer. La pièce finissait, c'était la catastrophe. Dorval, l'oeil sanglant, noyé de larmes, les lèvres bleues, les tempes livides, échevelée, à moitié nue, se tordait sur l'avant-scène à deux pas de la rampe. Bocage, fatal et silencieux, se tenait debout dans le fond : tous les mouchoirs étaient en jeu; les sanglots brisaient les corsets; un tonnerre d'applaudissements entrecoupait chaque râle de la tragédienne; le parterre, noir de têtes, houlait comme une mer; les loges se penchaient sur les galeries, les galeries sur le balcon. La toile tomba : je crus que la salle allait crouler : c'étaient des battements de mains, des trépignements, des hurlements; or, cette pièce était ma pièce : jugez ! J'étais grand à toucher le plafond. Le rideau se leva, on jeta à cette foule le nom de l'auteur.

« Ce n'était pas le mien, c'était le nom de l'ami qui m'avait déjà volé mon tableau. Les applaudissements redoublèrent. On voulait traîner l'auteur sur le théâtre : le monstre était dans une loge obscure avec Jacintha. Quand on proclama son nom, elle se jeta à son cou , et lui appuya sur la bouche le baiser le plus enragé que jamais femme ait donné à un homme. Plusieurs personnes la virent; elle ne rougit même pas : elle était si enivrée, si folle et si fière de son succès, qu'elle se serait, je crois, prostituée à lui dans cette loge et devant tout le monde. Plusieurs voix crièrent : Le voilà ! le voilà ! Le drôle prit un air modeste, et salua profondément. Le lustre, qui s'éteignit, mit fin à cette scène. Je n'essayerai pas de décrire ce qui se passait dans moi; la jalousie, le mépris, l'indignation, se heurtaient dans mon âme; c'était un orage d'autant plus furieux que je n'avais aucun moyen de le mettre au dehors : la foule s'écoula, je sortis du théâtre; j'errai quelque temps dans la rue, ne sachant où aller. La promenade ne me réjouissait guère. Il sifflait une bise piquante : ma pauvre âme, frileuse comme l'était mon corps, grelottait et mourait de froid. Je rencontrai une fenêtre ouverte, j'entrai, résolu de gîter dans cette chambre jusqu'au lendemain. La fenêtre se ferma sur moi : j'aperçus assis dans une grande bergère à ramages un personnage des plus singuliers. C'était un grand homme, maigre, sec, poudré à frimas, la figure ridée comme une vieille pomme, une énorme paire de besicles à cheval sur un maître-nez, baisant presque le menton. Une petite estafilade transversale, semblable à une ouverture de tirelire, enfouie sous une infinité de plis et de poils roides comme des soies de sanglier, représentait tant bien que mal ce que nous appellerons une bouche, faute d'autre terme. Un antique habit noir, limé jusqu'à la corde, blanc sur toutes les coutures, une veste d'étoffe changeante, une culotte courte, des bas chinés et des souliers à boucles : voilà pour le costume. ä mon arrivée, ce digne personnage se leva, et alla prendre dans une armoire deux brosses faites d'une manière spéciale : je n'en pus deviner d'abord l'usage; il en prit une dans chaque main, et se mit à parcourir la chambre avec une agilité surprenante comme s'il poursuivait quelqu'un, et choquant ses brosses l'une contre l'autre du côté des barbes; je compris alors que c'était le fameux M. Berbiguier de Terre-Neuve du Thym , qui faisait la chasse aux farfadets; j'étais fort inquiet de ce qui allait arriver, il semblait que cet hétéroclite individu eût la faculté de voir l'invisible, il me suivait exactement, et j'avais toutes les peines du monde à lui échapper. Enfin, il m'accula dans une encoignure, il brandit ses deux fatales brosses, des millions de dards me criblèrent l'âme, chaque crin faisait un trou, la douleur était insoutenable : oubliant que je n'avais ni langue, ni poitrine, je fis de merveilleux efforts pour crier; et... ».

Onuphrius en était là de son rêve lorsque j'entrai dans l'atelier : il criait effectivement à pleine gorge, je le secouai, il se frotta les yeux et me regarda d'un air hébété; enfin il me reconnut, et me raconta, ne sachant trop s'il avait veillé ou dormi, la série de ses tribulations que l'on vient de lire; ce n'était pas, hélas ! les dernières qu'il devait éprouver réellement ou non. Depuis cette nuit fatale, il resta dans un état d'hallucination presque perpétuel qui ne lui permettait pas de distinguer ses rêveries d'avec le vrai.