Camille
Claudel est née un 8 Décembre 1864 à Fère
en Tardenois. Elle est l'aînée des enfants d'une famille
bourgeoise, et de Paul Claudel son frère né en 1868 qui
deviendra poète, écrivain et diplomate.
Femme libre et artiste
elle aura eu un destin hors du commun. C'est à 17 ans qu'elle
décide de faire de la sculpture et d'en faire en quelque sorte
son métier. Elle vient à Paris en 1882, suit les cours
de l'Académie Colarossi, rencontre le sculpteur Alfred Boucher
et créée son premier atelier Rue Notre Dame des Champs.
En effet il est inconcevable à cette date qu'une femme ait accès
à l'Ecole des Beaux Arts. Ce n'est qu'en 1889 qu'une classe spéciale
pour les femmes, séparée des hommes est créée
et ce n'est qu'à partir de 1903 que celles ci auront la possibilité
de concourir pour le Prix de Rome.
En 1883, Camille Claudel
rencontre Auguste Rodin et devient son élève. Mais elle
devient aussi son inspiratrice, son modèle, sa confidente et
sa maîtresse tandis que Rodin vit avec Rose Beuret.
Elle pose, compose et travaille avec Rodin à la réalisation
des "Portes de l'Enfer", et inspire le maître ou davantage
encore pour nombre de ses créations. Elle même a réalisé
des bustes, dans une facture classique tels que "La Vieille Hélène"
en 1882, Avec " Paul en jeune romain" en 1884, l'influence
naturaliste et expressionniste de Rodin se fait sentir, dans laquelle
elle ajoute une touche classique ou historisante .
L'influence
de Rodin sur Camille Claudel est certaine dans des uvres telles
que "Homme accroupi" ou "Sakountala" au regard des
poses travaillées des modèles qui mettent en relief la
musculature des corps. Il est indéniable que l'influence de Camille
Claudel sur Rodin est tout aussi importante à cette époque
où elle créée " La jeune fille à la
gerbe" au regard de ce que sont certaines uvres de Rodin
telles que "Galatée", " Le frère et la
soeur", ou "Cybèle"
C'est à partir
de 1893 que les rapports du couple se dégradent davantage, par
des conflits avec Rose Beuret, mais aussi avec Rodin, dont Camille Claudel
commence à rejeter l' opportunisme et le soucis de sa réputation
à laisser croire que certaines de ses créations sont de
lui ou de son inspiration. C'est une séparation progressive et
douloureuse, Camille Claudel s'enferme dans son domicile qu'elle transforme
en atelier, tandis que Rodin ne pense qu'à sa gloire, grisé
qu'il est par le succès et les commandes officielles.
L'art de Camille Claudel
s'engage insensiblement dans une nouvelle direction, celle d'études
faites d'après nature, telles que " Les Causeuses"en
1894, ou "Clotho" en 1893.
C'est pendant cette période
que Camille réalise les uvres les plus représentatives
de son art : L'âge mur " dans une première version
en 1895, puis dans une seconde version très expressive et dramatique
de 1898, dans laquelle elle projette sa relation avec Rodin, "
La Petite Châtelaine" en 1896, l' "Hamadryade"
et "La Vague" en 1897, "La Profonde Pensée",
"Le Rêve au coin du feu" en 1899, " La Fortune
" en 1900, "L'Ecume" en 1901, " La joueuse de flûte"
en 1904, " La Valse", " L'Abandon" en 1905, uvres
qu'elle réalise en plusieurs versions, plâtre, puis marbre
ou bronze.
Ce
qui distingue l'art de Camille Claudel de celui d' Auguste Rodin, en
dehors de cette influence naturaliste que le maître apporte à
son élève, est la conception assymétrique et déséquilibrée
des sculptures de Camille Claudel notamment dans toutes ses uvres
de nature autobiographique : " La suppliante", "La Valse",
l'Age Mur" sont extrêmement représentatives de ce
déséquilibre qui attire, qui envoûte le regard du
spectateur, mais qui traduit le déchirement intérieur
de l'artiste.
Le
naturalisme de Camille Claudel et son indépendance se manifestent
dans des uvres telles que "Les causeuses" ou "Les
baigneuses" dans lesquelles s'expriment l'influence de l'art asiatique
à cette époque. L'artiste travaille par ailleurs des matériaux
difficiles tel que le marbre ou l'onyx dans des compositions mixtes
dans le but de se distinguer de Rodin. Ainsi dit-elle un jour à
son frère Paul en lui présentant son projet pour "Les
causeuses" : " tu vois que ce n'est plus du tout du Rodin".
Délaissée
par Rodin, et peu à peu abandonnée par sa famille, elle
sombre au fil des années qui suivent dans la misère matérielle
et s'enferme dans la solitude maladive d'une névrose obsessionnelle
grandissante. Elle va jusqu'à détruire une partie de ses
dernières uvres, et à détruire aussi ses
papiers, et sa correspondance.
L'artiste
dégrossissait, creusait, modelait, ciselait elle même les
marbres ou l'onyx en taille directe. Elle voulait vivre la lente mise
en forme de la matière sans avoir recours, comme le faisait Rodin
à des manuvres qui lui préparaient le travail.
En 1913, elle est admise
à l'Hôpital Psychiatrique de Ville-Evrard, avant d'être
transférée à l'Hôpital de Montdevergues,
près d'Avignon, en proie à un délire de persécution
complexe, allant en s'aggravant d'année en année jusqu'au
19 Octobre 1943 où elle meurt après trente années
de séquestration.
C'est
la force épique, sensible et tragique des scènes et la
parfaite maîtrise de la technique et du détail qui font
l'originalité de l'uvre de Camille Claudel dans l'histoire
de la sculpture par rapport à celle de son éminent maître
qui ne sera resté finalement qu'un classique dans un expressionnisme
donnant l'impression d'un dégrossi modelé, contrasté
et parfois grossier de la matière.
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