Les
Effarés
Noirs
dans la neige et dans la brume,
Au grand soupirail qui s'allume,
Leurs culs en rond,
A
genoux, cinq petits, - misère ! -
Regardent le boulanger faire
Le lourd pain blond...
Ils
voient le fort bras blanc qui tourne
La pâte grise, et qui l'enfourne
Dans un trou clair.
Ils
écoutent le bon pain cuire.
Le boulanger au gras sourire
Chante un vieil air.
Ils
sont blottis, pas un ne bouge,
Au souffle du soupirail rouge,
Chaud comme un sein.
Et
quand pendant que minuit sonne,
Façonné, pétillant et jaune,
On sort le pain ;
Quand,
sous les poutres enfumées,
Chantent les croûtes parfumées,
Et les grillons ;
Quand
ce trou chaud souffle la vie ;
Ils ont leur âme si ravie
Sous leurs haillons,
Ils
se ressentent si bien vivre,
Les pauvres petits plein de givre,
- Qu'ils sont là, tous,
Collant
leur petits museaux roses
Au grillage, chantant des choses
Entre les trous,
Mais
bien bas, - comme une prière...
Repliés vers cette lumière
Du ciel rouvert,
-
Si fort, qu'ils crèvent leur culotte,
- Et que leur lange blanc tremblote
Au vent d'hiver...
20 septembre 1870.