Après
la Révolution ratée de 1848, après vingt-cinq ans
de Romantisme,
les écrivains sont de plus en plus nombreux à sentir les
limites des épanchements sentimentaux. Le lyrisme de Musset
ou de Lamartine
apparaît à la fois impudique et usé. De là
la nécessité pour certains romanciers comme Flaubert de
se frotter à la réalité quitte à ce que
cela rogne les ailes à l'imagination; de là aussi le goût
de plusieurs jeunes poètes pour un art impersonnel, formellement
parfait et dont la froideur n'est pas un défaut mais au contraire
un gage de beauté. C'est de ce contexte qu'est né le Parnasse.
Deux maîtres guident
l'école parnassienne: Théophile
Gautier qui, du sein même du Romantisme, a été
le premier à proclamer les vertus de l'Art pour l'Art, d'une
poésie dégagée du souci de l'utilité et
de la morale, puis Leconte
de Lisle qui, en s'inspirant des mythologies de tous les
peuples et de toutes les époques, a su enrichir l'univers poétique
de nouveaux mots et de nouvelles formes tout en respectant, dans les
limites des connaissances de son temps, la vérité historique.
La grande vogue parnassienne
a duré une demi-douzaine d'années, vers 1860-66. Des publications
éphémères comme La Revue fantaisiste (1861) de
Catulle Mendès et Le Nain jaune (1864) permettent à l'esthétique
parnassienne de se mieux faire connaître. Toutefois, c'est surtout
Le Parnasse contemporain, dont la première livraison a été
publiée en 1866 et la seconde en 1871, qui établit le
prestige de la nouvelle école. Notons que le Parnasse de 1866
a repris des oeuvres d'écrivains comme
Leconte de Lisle, Banville,
Heredia,
Coppée
et Sully Prudhomme,
poètes dont certaines pièces sont reprises sur ce site,
mais également d'artistes comme Baudelaire,
Verlaine
et Mallarmé.
Autour de 1870, les
avancées de Rimbaud,
Verlaine,
Mallarmé annoncent le Symbolisme. Pour les esprits les plus aventuriers,
l'art objectif de Leconte de Lisle laisse désormais la place
à un langage novateur, suggestif qui a comme prétention
d'explorer les soubassements de l'être; toutefois, pour la plus
grande partie des critiques et des lecteurs de la fin du dix-neuvième
siècle, la solidité des pièces de Banville de Sully
Prudhomme et, plus encore, de Coppée continue de représenter
ce que la poésie offre de plus séduisant.
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