Lamartine Jeune

Alphonse-Marie-Louis de Prat de Lamartine
Biographie

POLICE DES POEMES

Né à Mâcon le 21 octobre 1790 Alphonse de Lamartine passe une enfance heureuse au contact de la nature dans une famille de petite noblesse sans grande fortune à Milly près de Mâcon. Il reçoit une éducation soignée chez les jésuites à Belley (1803-1807). Revenu à Milly il se passionne pour la lecture. Au cours d'un voyage en Italie (1811-1812), il fait la connaissance d'une jeune napolitaine qu'il évoquera sous le nom de Graziella.
Il fait un bref passage dans l'armée comme garde du corps de Louis XVIII sous la première restauration. Ses goûts le portent davantage vers la littérature que vers les honneurs de la cour, il se met à fréquenter les salons, s'essaye à quelques tragédies, Saül (1818) et compose ses premières élégies. En 1815, pendant les Cent-Jours, il se réfugia en Savoie. En septembre 1816, il se rend à Aix-les-Bains pour une cure thermale et fait la connaissance sur les bords du lac du Bourget de celle qui devint l'Elvire du Lac, Julie Charles, une femme mariée avec qui il vécut une idylle intense mais brève, puisque la jeune femme mourut de phtisie l'année suivante. Il l'attend vainement à Aix l'année suivante. L'idylle tragiquement interrompue fournit à la sensibilité du poète un thème privilégié d'inspiration. Son premier recueil les Méditations parait en 1820. Les plus émouvantes de ces pièces, le lac et l'immortalité (1817), l'isolement (1818), Le soir, le Souvenir, le vallon, L'automne (1819) retracent les principales étapes de son aventure sentimentale. Les méditations venaient à leur heure, la génération de 1820 lassée ou sevrée d'héroïsme classique attendait le poète qui saurait exprimer les tendances profondes de sa sensibilité. Lamartine semble s'acheminer vers la maturité, il épouse une jeune anglaise Elisabeth Birch et part pour l'Italie. Il publie les Nouvelles Méditations (1823) sans retrouver le succès car elles n'ont pas l'attrait de la nouveauté. La ferveur spirituelle de Lamartine s'est fortifiée. Dans la Mort de Socrate (1823) et le Dernier Chant du pèlerinage de Childe Harold (1825), qui est un hommage à Byron, il apparaît hanté par l'immortalité. A partir de 1826 devant les paysages italiens, il célèbre sa foi chrétienne et publie en 1830 une symphonie à la gloire de Dieu, Harmonies poétiques et religieuses. Il est élu à l'Académie française en 1830 et son engagement politique dans La révolution de juillet 1830 donne un tour nouveau à sa carrière. Par conviction légitimiste, Lamartine abandonne la carrière diplomatique pour se lancer dans la politique. Il est battu en 1831 aux élections législatives. Sa production poétique de cette période A Némésis porte la marque de ses préoccupations politiques, il se flatte de défendre la vraie liberté. Au cours d'un voyage en Orient en 1835, il perd sa fille unique, Julia. Son deuil lui inspire Gethsémani. À son retour, il est est élu député et refuse d'être rattaché à un parti. Jusqu'en 1848, il défend à la Chambre des idées libérales et progressistes. Son activité littéraire, moins intense, se concentre alors dans le projet d'une vaste épopée qui devait raconter l'histoire de l'âme humaine. Rédigés dans cette perspective, Jocelyn (1836), la Chute d'un ange (1838), et plus tard Recueillements poétiques (1839), firent de lui le chantre d'un «christianisme libéral et social». L'œuvre est pleine de souvenirs personnels. Après Jocelyn Lamartine publie un recueil de 11000 vers, La chute d'un ange que le public accueilli froidement. Mais les exigences de la vie publique empêche Lamartine de mener à bien son entreprise, il trouve le temps cependant de publier Les recueillements poétiques. Sous le ministère Guizot Lamartine passe à l'opposition. Il publie, en 1847, une Histoire des Girondins, qu'ils considère comme des modèles de sagesse. L'œuvre est destinée à donner au peuple «une haute leçon de moralité révolutionnaire, propre à l'instruire et à le contenir à la veille d'une révolution». L'intérêt de l'ouvrage lui valut, en février 1848, d'être Ministre des affaires étrangères du nouveau gouvernement républicain. Toutefois, son échec face à Louis Napoléon Bonaparte à l'élection présidentielle, puis le coup d'État de 1851 mirent un point final à sa carrière politique. Alors commence les années de misère. Pour payer des dettes criardes, Lamartine est condamné à travailler sans répit. Il publie à cette époque des récits qui sont autant d'épisodes autobiographiques idéalisés, Confidences (1849), contenant l'épisode célèbre de Graziella (1849), Raphaël (1849), ses amours avec Elvire, Geneviève (1851) le destin d'une humble servante, Le tailleur de pierre de Saint-Point celle d'un Jocelyn laïque.Lamartine publie aussi de nombreuses compilations historiques, Histoire de la Restauration (1851), Histoire des Constituants, (1853), Histoire de la Turquie (1853-1854), Histoire de la Russie (1855), des sommes littéraires, Cours familier de littérature (1856-1869) et s'occupe surtout de la réédition de ses œuvres complètes, Œuvres complètes en 41 volumes (1849-1850). On trouve çà et là quelques poèmes inspirés, «le Désert», «la Vigne et la Maison», des romans intéressants qui montrent un Lamartine romancier des humbles, Geneviève, l'histoire d'une servante et le Tailleur de pierres de Saint-Point (1851), mais dans l'ensemble, le souffle de ses débuts manque à ces textes, dont l'écriture est motivée davantage par le besoin d'argent que par l'inspiration. Alphonse de Lamartine meurt le 28 février 1869, dans un oubli presque total et après avoir vendu peu à peu tous ses biens. Les Méditations poétiques restent le chef-d'œuvre de Lamartine. Acte de naissance du romantisme en France, l'ouvrage reste assez conventionnel par sa forme. La versification, régulière, et le lexique,d'un registre élevé, restaient ceux du siècle précédent. Lamartine sait conférer à ses poèmes une musicalité particulière, une harmonie fortement évocatoire, qui est considérée, aujourd'hui encore, comme l'une des principales qualités de son œuvre. C'est davantage dans la teneur de ses poèmes que dans leur forme que Lamartine ouvre une nouvelle ère poétique.

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[1790] - [1869]
Alphonse de Lamartine

«On admire le monde à travers ce qu'on aime.»
Alphonse de Lamartine, Jocelyn.

Alphonse de Lamartine, naît à Mâcon le 21octobre 1790 dans une famille de petite noblesse légitimiste sans grande fortune. Il sera l’aîné de six enfants; pas de frère, rien que des sœurs; à lui, par conséquent, tous les châteaux et toutes les terres de la famille.
Lorsqu’il a vingt ans, il reçoit une éducation soignée lors de ses études à Belley, chez les Jésuites déguisés en Pères de la Foi. Il souhaiterait entrer dans la diplomatie ou, comme l'avait fait son père, dans l’armée; mais Napoléon est sur le trône: il mène donc sous l'Empire la jeunesse oisive de ces royalistes intransigeants pour qui Napoléon, malgré toute sa gloire, n'était que «l'usurpateur».
Une solide éducation classique, le contact avec les réalités de la campagne, des lectures désordonnées mais abondantes, un voyage à Naples en 1811 au cours duquel il s'éprit d'une employée de la Manufacture des tabacs, cette Antoniella que, trente ans plus tard, il déguisera en «corailleuse», dans Graziella constituent une formation qui doit lui permettre toutes les ambitions.
Mais cette âme rêveuse et mélancolique ne profite guère de la Restauration, qui lui accorde pourtant la place enviée de garde du corps du roi Louis XVIII. Il s’abstient, en 1815, pendant les Cent-Jours, de suivre Louis XVIII à Gand, se réfugie en Suisse, puis en Savoie, reprend son service après Waterloo, mais démissionne bientôt et cherche un autre emploi.
Ses goûts le portent davantage vers la littérature que vers les honneurs de la cour. Il se met à fréquenter les salons, s'essaye à quelques tragédies (Saül, 1818) et compose ses premières élégies.
En 1816, alors qu'il est en convalescence à Aix-les-Bains, sur les bords du lac du Bourget, il rencontre celle qui devint l'Elvire du Lac, Julie Charles, femme d'un officier qui tient garnison à Mâcon, avec qui il vécut une idylle intense (plus sexuelle, semble-t-il, que sentimentale), mais brève, puisque la jeune femme mourut de phtisie l'année suivante.
En 1820, enfin (il va avoir trente ans), il parvient à se glisser dans la carrière de diplomate et se marie, épousant une Anglaise catholique, Mary-Ann Birch dont il aura deux enfants qui mourront l’un et l’autre, le premier (Alphonse) à vingt mois, le second (Julia) à dix ans et demi. Cette même année, il fit paraître sous le titre de «Méditations poétiques» des poèmes qui le rendirent bientôt célèbre et qui sont considérés comme la première manifestation du romantisme en France. Ces vers lyriques, évoquant les inquiétudes amoureuses et spirituelles d'une âme tourmentée, correspondent à la sensibilité d'un public que les auteurs classiques ne satisfont plus.
La décennie suivante le voit mener de front une double carrière de diplomate à Florence en Italie, et de poète qui continue d'explorer la même veine lyrique, avec les «Nouvelles Méditations» (1823), la Mort de Socrate (1823) et le Dernier Chant du pèlerinage de Childe Harold (1825), qui est un hommage à Byron. Élu à l'Académie française en 1830, il connait un nouveau succès en publiant les deux volumes de ses «Harmonies poétiques et religieuses», oeuvre d'un lyrisme puissant, qui révélait un poète en pleine possession de son talent.
La Révolution de Juillet lui fournit le prétexte de quitter, par apparente fidélité légitimiste, cette carrière de diplomate qui l’ennuie, et il se présente à la députation, tout en songeant en même temps à un vaste poème, dont il a conçu, depuis 1821, le projet. Sa production poétique de cette période porte la marque de ses préoccupations politiques («Ode sur les révolutions», «Némésis»).
Après un premier échec à la députation en 1831, il s'embarque en juin 1832 pour le Proche-Orient, voyage au cours duquel il perdit sa fille, Julia (Voyage en Orient, 1835). Élu, en son absence, député de Bergues (près de Dunkerque), grâce aux efforts d’un de ses beaux-frères, il regagne la France à l’automne 1833, et prend place à la Chambre, le 23 décembre 1833, pour l’ouverture de la session. Député jusqu'en 1848, – de Bergues d’abord, de Mâcon ensuite, et, finalement, du Loiret, jusqu’au coup d’État du 2 décembre 1851, – sa principale préoccupation fut de défendre à la Chambre des idées libérales et progressistes.
Son activité littéraire, moins intense, se concentre alors dans son projet ce cette vaste épopée qui devait raconter «l'histoire de l'âme humaine». Rédigés dans cette perspective, Jocelyn (1836), la Chute d'un ange (1838), et plus tard Recueillements poétiques (1839), firent de lui le chantre d'un «christianisme libéral et social». Après ces publications, il abandonne la poésie et se consacre tout entier à l’action politique.
Soucieux de l'avenir de la France, il publie son Histoire des Girondins (1847) qui fait partie, dans sa pensée, de cette action: écrite à l'usage du peuple elle est destinée à lui donner «une haute leçon de moralité révolutionnaire, propre à l'instruire et à le contenir à la veille d'une révolution». L'intérêt que suscite cet ouvrage lui vale, en 1848, d'être ministre des Affaires étrangères du nouveau gouvernement républicain; il est, en fait, le chef du gouvernement provisoire, qui s’est constitué le 24 février.
Ses adversaires le feront tomber du pouvoir le 24 juin, et Lamartine, homme politique, s’acharnera à jouer encore un rôle de conseiller au moins jusqu’à ce que Louis Bonaparte, «président parjure, égorge la république». Son échec face à Louis Napoléon Bonaparte à l'élection présidentielle, puis le coup d'État de 1851 mirent un point final à sa carrière politique. Il meurt à Paris dix-huit ans plus tard.
Ses quelques vingt dernières années (1849-1869) ne sont guère qu’une lutte incessante et vaine pour sortir du gouffre de ses dettes. Lamartine n'est plus, dès lors, qu'un homme de lettres contraint à un travail forcé, à multiplier les publications alimentaires en de nombreuses compilations historiques (Histoire de la Restauration, 1851; Histoire des Constituants, 1853; Histoire de la Turquie, 1853-1854; Histoire de la Russie, 1855).
On trouve aussi çà et là des romans intéressants qui montrent un Lamartine romancier des humbles et qui sont autant de récits autobiographiques idéalisés (Confidences, contenant l'épisode célèbre de Graziella, 1849; Raphaël, 1849; Geneviève, histoire d'une servante; Le Tailleur de pierres de Saint-Point, Fior d’Aliza, 1850-1851, Antoniella, Nouvelles Confidences, 1851), et quelques poèmes inspirés dans des sommes littéraires tel que ce Cours familier de littérature, 1856-1869, mensuel, où surgiront, en 1856, ses derniers vers: «Le Désert», «La Vigne et la maison». Il s'occupe surtout de la réédition de ses œuvres complètes (Oeuvres complètes en 41 volumes, 1849-1850). Mais dans l'ensemble, le souffle de ses débuts manque à ces textes, dont l'écriture est motivée davantage par le besoin d'argent que par l'inspiration.
Il est écrasé, dans sa vieillesse, étouffé par les problèmes d’argent; nulle prodigalité ostentatoire pourtant: la cause permanente de son engloutissement, ce sont ces sommes qu’il s’était engagé à verser annuellement à chacune de ses cinq sœurs pour compenser envers elles, l’avantage qui lui avait été fait par ses oncles et tantes lui léguant, à lui, seul mâle, leurs châteaux et leurs terres; mais ces propriétés lui coûtent plus qu’elles ne lui rapportent, et il n’en fait pas moins, chaque année, des versements considérables en argent liquide, à ses sœurs ou à ses neveux; il se renie, sur tous les plans, haussant les épaules et sur sa poésie et sur la noblesse de ses anciennes «amours» et sur l’élan même qui l’avait poussé dans la lutte en 1830 («Allons! dira-t-il en 1863, il n’y avait là que tourment d’activité et ambition d’éloquence»). Ses contemporains se détournent de lui; la masse l’ignore; les hommes politiques et les écrivains le tiennent pour le déplorable survivant de lui-même. À cet homme, cependant, la jalousie, la fureur haineuse resteront toujours étrangères. Alphonse de Lamartine mourut le 28 février 1869, dans un oubli presque total et après avoir vendu peu à peu tous ses biens. Il aura vécu quarante ans dans un consentement ininterrompu à se passer du bonheur, essayant seulement, comme il pouvait, de faire son métier, «le dur et beau métier de vivre».

son acte de décé