A
ÉMILE ZOLA
[1881
?]
Cher
Maître et ami,
Vous allez sans doute recevoir une lettre du sieur Laffitte1 à
mon sujet. Voici pourquoi. Vous vous rappelez qu'une Nouvelle m'a
été demandée par lui et que je vous ai consulté
sur la somme que je pouvais réclamer. Vous m'avez engagé
à exiger 50 centimes ; ce que je viens de faire. Il a poussé
de grands cris, disant « C'est ce que je paye Zola » et
me laissant même entendre que vous pourriez trouver mauvais
que je fusse payé autant que vous !!!!! -
Je lui ai répondu tranquillement que cela ne vous étonnerait
point, car je vous avais consulté et que vous n'aviez point
jugé exagéré la somme de 50 centimes par ligne,
attendu que Le Gaulois me payait plus largement de simples chroniques.
(J'ai 125 fr. par article de 200 lignes environ).
Laffitte alors m'a dit : « Je vais écrire à Zola
tout de suite pour le consulter ».
Voilà les faits.
J'ajoute que je ne tiens nullement à donner ma nouvelle au
Voltaire. Mme Adam m'en demande une et je n'en ai pas. Je lui passerai
celle-là.
Je vous serre bien affectueusement la main, mon cher Maître
et ami, en vous priant de me rappeler au bon souvenir de votre femme.
GUY
DE MAUPASSANT
J'ai
tenu à ce que vous sachiez de quelle façon cet imbécile
a pris le parti de s'adresser à vous.
1
Jules Laffitte, directeur du Voltaire.