Guy De Maupassant

« Et, dans la suite des temps, ceux qui ne le connaîtront que par
ses œuvres l'aimeront pour l'éternel chant d'amour qu'il a chanté à la vie »
Émile Zola

Correspondance (1880)

A Emile Zola

A ÉMILE ZOLA

[Avril 1880.]

Cher Maître et ami,
Alexis l'autre jour me demandait quand on pourrait toucher quelque chose sur les « Soirées de Médan » - J'en ai parlé ce matin à Hennique qui aurait désiré également voir cette question résolue, sans oser cependant l'aborder, avec Charpentier. J'ai donc été trouver notre sympathique éditeur, et, sous un prétexte d'achat de bibelots dont je feignais avoir envie, je lui ai demandé quand on pourrait toucher quelques sols sur les 3 éditions vendues. Il m'a répondu qu'il vous en parlerait et m'avertirait ensuite. Il est convenu qu'il vous donnera 500 francs par édition. Il n'a du reste soulevé aucune difficulté à ce sujet.
Quand vous le verrez, vous serez bien aimable de lui parler de cette question et de décider avec lui comment nous toucherons. Je lui ai dit, et il me paraît résolu, que nous partagerons par sixièmes. Toute autre manière serait peu applicable. Le compte par ligne serait ridicule. Tranchez donc cette question car je ne serai pas fâché non plus de palper les 250 balles qui me reviendraient à peu près.
Je vous serre bien affectueusement les mains.

GUY DE MAUPASSANT

Et WOLFF - !!!! -1
Hennique, qui croit à une justice, a été suffoqué - et Charpentier en a cessé de croire à la vente du livre. Je regrette seulement que le dit Wolff ne nous ait pas traités de misérables !

1 Le 19 avril 1880, Albert Wolff avait vivement attaqué, dans le Figaro, Les Soirées de Médan, comme si Médan, disait-il, « était aussi connu que les capitales européennes ». L'article se terminait ainsi : « Sauf la nouvelle de Zola, qui ouvre le volume, c'est de la dernière médiocrité. » Mais, quelques jours plus tard, dans le même journal, paraissait, sans signature, une note d'un autre ton : « Ne soyons pas si sévères : nous avons dans Les Soirées de Médan un livre intéressant, écrit par six hommes avec le souci, le désir d'être vrais, et c'est quelque chose de respectable aujourd'hui. »