menu poètes
menu Aragon
sommaire

 

Louis Aragon
Neuilly sur Seine, 1897 - Paris, 1982

Feu de joie
Opinions et jugements


Certaines Oeuvres ont été mises par mes soins en RTF ( word )
afin de les visualiser - télécharger gratuitement la visionneuse Word ICI

retour menu Aragon

Opinions et jugements sur Feu de joie


Philippe Soupault (1920)
La paille qui brûle est notre jeunesse. Louis Aragon s'est approché de ce feu pour s'y chauffer les doigts. Le coeur reste froid. Pourquoi mon ami parle-t-il de son enfance avec cette désinvolture? Je sais qu'il ne peut oublier les livres de prix, les ballons multicolores et les yeux inquiétants des filles de joie. Je sais encore que cette indifférence est une pudeur mal déguisée. Mais nous n'avons pas peur de lui, nous n'avons pas peur de pleurer.
Pourquoi ce sourire insolent?
Pour Louis Aragon, la terre est une assez jolie bulle de savon. Il est dangereux d'y allumer du feu. Les flammes sont jaunes ou bleues pour notre plaisir. Beaucoup ont souri en lisant ses poèmes, beaucoup les ont trouvés charmants, je n'ai pu m'empêcher d'être triste en songeant à ces jolis feux qu'on allume dans la campagne et qui ne durent qu'une soirée. J'attends au bord d'une route l'incendie des fermes et des forêts.
Ne vous hâtez pas trop de pleurer de peur d'être obligé d'en sourire. J'agite mon mouchoir et je regarde. Viendrez-vous, mon ami? Je vous attends. Nous vous attendons.


Roger Allard (1920)
La poésie de M. Aragon est agencée comme les parcs d'attractions. C'est un genre d'amusement dont on se dégoûte assez vite. Du moins M. Aragon porte-t-il dans le procédé de tachisme verbal dont il se satisfait à présent, un soigneux désir de fraîcheur.
L'uniforme de secte - une secte assez mélangée - qu'il a cru devoir endosser ne lui va pas mal, à cause des retouches qu'une fantaisie personnelle a faites au modèle réglementaire. Tout n'est pas affecté dans le charme aigrelet de cette attitude, mélange de précocité aisée et de jeune grâce naturelle.

Le son que rendent ces phrases a la qualité qu'il faut pour qu'on prenne la peine de déjouer l'artifice typographique, l'absence de ponctuation et autres ficelles où s'empêtrent les machinistes de "l'esprit nouveau".
ces phrases sont des notations d'un coloris agréable, des modulations qui rappellent l'art sensible et nuancé de M. Léon-Paul Fargue.
Telle est, croyons-nous, l'affinité naturelle du talent de M. Aragon, auquel on se plaît encore à reconnaître un sens délié de la cocasserie et du quiproquo syllabiques où M. Max Jacob est passé maître, et dont il demeure, en dépit de tous les assimilateurs, utilisateurs et vulgarisateurs, le virtuose.
Mais ces drôleries ne sont que la monnaie de singe de l'esprit. M. Aragon est capable d'en frapper de plus loyale. Sa phrase a du nombre et la souplesse qu'il faut pour suivre les réflexes psychologiques. Poète, il a des dons de fabuliste et de conteur, dons précieux et qu'on regretterait de voir gâchés dans une espèce de mysticisme de la mystification.


Paul Neuhuys (1922)
Louis Aragon n'a pas abjuré tout scrupule d'art. Il semble parfois même demeurer attaché aux anciennes formes prosodiques. Louis Aragon a néanmoins trouvé son salut en Dada. C'est un feu de joie où il sacrifie toutes les vaines acquisitions de l'esprit pour un ordre de choses nouveau qui surgira des absurdes suggestions de la conscience. La couleur neutre - bitum ou réséda - n'est pas la couleur dominante chez Aragon. Nous y trouvons même des couleurs vives que les dada n'affectionnent que médiocrement, en général.

Louis Aragon est parmi les data le seul qui semble préparer un terrain de conciliation entre les suggestions de la conscience et les exigences de la raison.

retour menu Aragon