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Louis Aragon
Neuilly sur Seine, 1897 - Paris, 1982

Feu de joie - Soifs de l’ouest

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Feu de joie - Soifs de l’ouest
(1920)


Soifs de l’ouest

Dans ce bar dont la porte
sans cesse bat au vent
une affiche écarlate
vante un autre savon
Dansez dansez ma chère
nous avons des banjos

Oh
qui me donnera seulement à mâcher
les chewing-gums inutiles
qui parfument très doucement
l’haleine des filles des villes

Epices dans l’alcool mesuré par les pailles
et menthes sans raison barbouillant les liqueurs
il est des amours sans douceurs
dans les docks sans poissons où la barmaid
défaille

sous le fallacieux prétexte
que je n’ai pas rasé ma barbe
aux relents douteux d’un gin
que son odorat devine
d’un bar du Massachussets

Au trente-troisième étage
sous l’œil des fenêtres
arrête

Mon cœur est dans le ciel et manque de vertu

Mais les ascenseurs se suivent
et ne se ressemblent pas
Le groom nègre sourit tout bas
pour ne pas salir ses dents blanches

Ha si j’avais mon revolver
pour interrompre la musique
de la chanson polyphonique
des cent machines à écrire

Dans l’état de Michigan
justement quatre-vingt-trois jours
après la mort de quelqu’un
trois joyeux garçons de velours
dansèrent entre eux un quadrille

avec le défunt

comme font avec les filles
les gens de la vieille Europe
dans les quartiers mal famés
Heureusement que leurs lèvres
ignoraient les mots méchants
car tous les trois étaient vierges
comme on ne l’est pas longtemps

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