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Alain
Fournier
1886 - 1914
Le Grand Meaulnes
-(1)
TROISIÈME PARTIE
CHAPITRE
IV. La grande nouvelle.
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Le Grand Meaulnes. TROISIÈME PARTIE CHAPITRE IV. La grande nouvelle. jour-là j'ai amassé du remords pour longtemps..." Assis sur une chaise
de l'estrade, la tête basse, l'écoutant sans le regarder
je ne savais que penser de ces "Enfin, dis-je,
Meaulnes, explique-toi mieux! Pourquoi ce long voyage? - Eh bien, oui, répondit-il. Tu te souviens de cette promesse que j'avais faite à Frantz?... - Ah! fis-je soulagé, il ne s'agit que de cela?... - De cela. Et peut-être aussi d'une faute à réparer. Les deux en même temps..." Suivit un moment de silence pendant lequel je décidai de commencer à parler et préparai mes mots. "Il n'y a qu'une
explication à laquelle je croie, dit-il encore. Certes, j'aurais
voulu revoir une fois Il changea de ton pour reprendre avec une animation étrange, en se rapprochant de moi: "Mais, écoute,
Seurel! Cette intrigue nouvelle et ce grand voyage, cette faute que
j'ai commise et qu'il Un temps, pendant
lequel péniblement il essaya de ressaisir ses souvenirs. J'avais
manqué l'occasion Je prononçai
donc ma phrase, qui était préparée pour l'instant
d'avant, mais qu'il n'allait plus maintenant. "Et si je venais t'annoncer que tout espoir n'est pas perdu?..." Il me regarda, puis,
détournant brusquement les yeux, rougit comme je n'ai jamais
vu quelqu'un rougir: "Que veux-tu dire?" demanda-t-il enfin, à peine distinctement. Alors, tout d'un trait,
je racontai ce que je savais, ce que j'avais fait, et comment, la
face des choses ayant Il était maintenant affreusement pâle. Durant tout ce récit,
qu'il écoutait en silence, la tête un peu rentrée,
dans l'attitude de quelqu'un qu'on a "Ah! dit-il, tu vois... (comme s'il eût guetté une occasion de justifier sa conduite et le désespoir où il avait < page
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