ANTONIN
ARTAUD :
Le mauvais rêveur.
Mes rêves sont avant tout une liqueur, une sorte d'eau de nausée
où je plonge et qui roule de sanglants micas. Ni dans la vie
de mes rêves, ni dans la vie de ma vie je n'atteins à
la hauteur de certaines images, je ne m'installe dans ma continuité.
Tous mes rêves sont sans issue, sans château-fort, sans
plan de ville. Un vrai remugle de membres coupés, je suis,
d'ailleurs, trop renseigné sur ma pensée pour que rien
de ce qui s'y passe m'intéresse: je ne demande qu'une chose,
c'est qu'on m'enferme définitivement dans ma pensée.
Et
quant à l'apparence physique de mes rêves, je vous l'ai
dit: une liqueur.